Publié le 10 septembre 2021 à 18h00
43 ans après, Goldorak reprend des couleurs… bretonnes
Goldorak revient. Cocorico, il est français. La série culte des années 80 trouve un épilogue dans une BD, réalisée par une équipe de créateurs plus balèze qu’un Golgoth… Cerise sur le kouign amann : on y trouve même un Breton, qui donne des couleurs à Actarus et sa bande.
Les éditions Kana redonnent vie à Goldorak, avec derrière cet album, une machine de guerre française et une équipe des auteurs les plus en vue. (© Kana)
Il reprend du service, et il va régler les questions restées en suspens à coups de fulguropoing. Les plus de 40 ans (et même les autres) peuvent difficilement affirmer ne pas connaître. Goldorak, c’était la star des cours de récré pendant douze ans, de 1978 à 1990, le symbole de cette génération biberonnée à la nouveauté manga. « Plus de 3,5 millions de disques du générique vendus en France, 2 000 lettres quotidiennes envoyées à Antenne 2 par le public et une génération avec son verre à moutarde Goldorak », tease la maison d’édition Kana, qui rebranche le robot géant. L’œuvre du créateur Gô Nagai, le célèbre mangaka, également papa de Mazinger et de Devilman, va reprendre vie dans une bande dessinée à sortir le 15 octobre.
Ce ne sera pas Gô Nagai qui versera le plutonium (ou le pulvonium, on ne sait plus trop…) dans le réservoir de sa créature. L’auteur passe les commandes à une équipe de créateurs français. Français ? Oui Monsieur. « Le projet est né d’une discussion entre Xavier Dorison (« Sanctuaire », « Le Troisième Testament », « Undertaker »…) au festival d’Angoulême et Christel Hoolans, directrice éditoriale de Kana », explique le Breton Yohann Guillo. Xavier, « fan absolu de Goldorak », lance une bouteille à la mer, propose d’écrire une lettre à Gô Nagai. Ça tombe bien, la maison Kana a son contact. La lettre est traduite, envoyée au Japon, début 2016. La réponse revient. Gô Nagai libère la bête.
« Cela a un peu surpris tout le monde. Les négociations ont encore pris un an, mais on y est enfin… Il ne faut pas se tromper, c’est vraiment une grosse production qui arrive. Goldorak, ça reste une référence qui n’a pas été oubliée en France, mais aussi en Italie et en Espagne, même si c’est vrai qu’il est peut-être un peu moins culte au Japon », se réjouit le coloriste de Plumergat, qui est monté dans le vaisseau en marche, un peu plus tard. « Avec Xavier Dorison, on a Denis Bajram (« Universal War One »), Brice Cossu (« Paradis perdu », « Franck ») et Alexis Sentenac (« Les Contes de Brocéliande », « Siberia 56 »). Tout ce petit monde avait l’habitude de se retrouver chaque jour pour échanger sur Discord, à travers L’Atelier virtuel. J’y étais aussi. Je me suis permis de faire quelques remarques sur la couleur - sachant que ce sont de super auteurs et qu’ils font les couleurs eux-mêmes - et ils m’ont proposé de les rejoindre sur le projet. »
L’icone de fer et d’acier la plus pop de la galaxie sera de retour pour un one shot. Des suites ne sont pas envisagées. « C’est un travail intense sur plusieurs années. On voulait vraiment en faire un bel ouvrage ». Dans un album de 168 pages, avec le sens de lecture occidental, les auteurs redonnent des couleurs à Actarus et sa sœur, de retour sur Euphor. La guerre entre les forces de Vega et Goldorak est un lointain souvenir. Jusqu’au jour où…
1 Fulguropoing
2 Rétrolaser
3 Astérohache made in France
4 Cornofulgure vers le futur, mais pas au-delà
C’est lui qui fait monter le rouge sur la cuirasse de Goldorak : le coloriste Yoann Guillo est un spécialiste reconnu de la profession.
Ça représente quoi, d’être embarqué dans ce projet ?
Je suis fan depuis l’enfance de Goldorak. Gamin, je dessinais mes propres Golgoths. Participer à une telle production, avec ces auteurs, c’est énorme… Là, je sors d’un tunnel de plusieurs semaines où il a fallu assurer la couleur de l’album dans des délais assez courts… C’était intense. C’est toujours comme cela, les coloristes arrivent en bout de course et on a la pression qui monte, avec très peu de temps pour boucler. On est un peu la 5e roue du carrosse, dans la profession.
Que proposiez-vous de plus sur les couleurs de Goldorak ?
Je pense que j’ai apporté une touche plus pop. Sur les premiers dessins, je trouvais qu’il y avait quelque chose de très orageux et de très sombre. Avec cette série, on était dans les années 70-80 et au niveau de l’ambiance, il fallait quelque chose de plus coloré. Il ne fallait pas perdre ça, avec l’album. Je l’ai fait remarquer à l’équipe, ils m’ont mis au défi de faire les couleurs.
Qu’est-ce qui fait un bon coloriste ?
C’est une ambiance de cuisine fine : même si on est parfois satisfait du résultat, il faut y revenir à plusieurs fois, pour aller chercher une intensité de couleur, une atmosphère… La compréhension du dessin et du scénario est nécessaire. Il faut savoir travailler sur les effets de lumière, au service de la narration. Avec les couleurs, on détermine dans quelle atmosphère on va plonger le lecteur. J’assume des choix qui ne sont pas attendus, notamment avec des couleurs qui ne correspondent à rien, dans la réalité. Il s’agit de mettre une couleur vive en fond, pour évoquer le choc, la violence… Ou un vert qui n’a rien à faire dans le décor et qui plonge dans le malaise, un orange qui accentue la surprise… C’est une technique qui est très employée, dans les anciens « Lucky Luke », par exemple.
Bio bulles
Yoann Guillo a suivi des études d’architecture à Rennes puis de communication visuelle. C’est là qu’il s’est passionné pour la composition et les couleurs, ainsi que pour le fonctionnement de la lumière. En 2003, il rencontre Christian Paty et se lance sur la série « Les Blondes » (Soleil) en 2004. Yoann a aussi travaillé sur « Marlysa » (Soleil), « Le Collège invisible » (Soleil), « Les Arcanes » (Midi-Minuit) FRNCK » (Dupuis) et « Largo Winch » (Dupuis).
Le regard bleu acier…Photo Le Télégramme/Gwen Rastoll
L'une des planches du retour de Goldorak, avec les couleurs du Breton Yoann Guillo. (© Kana)
Une autre planche, avant la découverte de l'album à sortir en édition nationale. (© Kana)